QUI QU'À MIS ÇA LÀ, PIS QU'À PAS BALAYÉ
Il y a longtemps que les compagnies ont équipés leurs avions d'une classe intermédiaire qui se veut un compromis entre la classe affaire et la classe économique. Cette espèce de classe économique améliorée propose des sièges de légèrement, à largement plus confortables et un service plus accesoirisé. Mais elle est surtout beaucoup plus intimiste car elle contient rarement plus de 40 sièges.
Elle permet parfois de ménager les ego de certains, arrivant à l'avion en brandissant sous notre nez la lettre de recommandation pour un surclassement signée de la main de leur pote commandant de bord, et dont un coup d'oeil aux 3 jeunes enfants vous dissuadent de les lâcher en classe affaire. Deux jeunes enfants qui se disputent bruyamment malgré les supplications de leurs parents et un bébé d'une vingtaine de mois assez remuant. Rien à voir avec la parfaite image d'épinal et donc aucune chance que les passagers payants de la classe affaire apprécient le tableau.
Une de mes bonnes copines chef de cabine principale, belle femme blonde, au carré impeccable et issue d'une grande famille du sud de la France, me racontait, autour d'un verre de rosé en terrasse, le clash qu'elle a eu avec un passager surclassé sans raison apparente, par un des revendeurs de billets travaillant de près avec la compagnie. Ce qu'on remarque chez ma copine avant tout, c'est sa bonne humeur, son visage avenant, et surtout, de par le milieu d'ou elle vient une certaine éducation. Bref rien d'une blonde l'Oréal.
En ce jour de période creuse dans le calendrier aérien, en plus des deux surclassés, 5 ou 6 passagers seulement occupent la petite cabine de la classe économique améliorée. Une fois arrivé à bord et sous l'air impassible des autres passagers, le couple essaye tous les sièges de la cabine, ouvrant au passage toutes les couvertures, neuves et emballées sous plastiques, des sièges inoccupés.
La CCP, au courant des conditions de leur voyage grâce à la PIL, prend note mentalement mais n'intervient pas, et le vol se déroule sans incidents particuliers.
Pendant la croisière, une hôtesse voyageant pour convenances personnelles ( terme un peu pompeux pour dire qu'elle rentrait de vacances), et elle même surclassée, mais en classe affaire dit à mon amie avoir vu le passager se faufiler dans la cabine presque déserte et, la croyant endormie, glisser subrepticement 2 couvertures encore sous plastique, dans le sac qu'il avait prit soin d'apporter. Elle était bien sur au courant des débordements du couple, parce qu'à bord, les histoires vous reviennent comme l'écho au fond du Grand Canyon.
Encore une fois, la CCP enregistre et garde l'information dans un coin de son cerveau pour plus tard.
Elle est de garde dans le galley à l'avant, celui situé entre le poste de pilotage et la cabine classe affaire, à proximité des toilettes, quand monsieur "j'aggrave mon cas" débarque dans l'office afin d'utilser les toilettes. Hors sur ce point, les PNC ne dérogent pas à la règle (pour le plus grand plaisr des passagers d'ailleurs). Les toilettes de la classe affaire sont exclusivement réservées aux passagers de la classe affaire.
Elle le bloque, et sans aucune allusion aux couvertures, l'invite à utiliser les toilettes de l'arrière.
L'autre ne saisit pas que c'est précisément à ce moment là qu'il doit faire demi- tour, et insiste lourdement.
- Pourquoi? On ne peut pas pisser chez les riches? C'est différent?
Devant l'avalanche de questions aussi stupides que celui qui les pose, mon amie reste calme, mais affiche quand même sa mine des mauvais jours (si elle affiche sa "mine des mauvais jours" au moment ou vous arrivez dans le galley, vous faites demi-tour sans demander votre reste, vous n'avez rien à y faire, vous n'avez pas soif, vous n'avez besoin de rien).
- Ces toilettes sont réservés aux passagers de la classe affaire monsieur. Veuillez s'il vous plaît utiliser les toilettes de l'arrière.
- T'as fait des études pour être aussi conne?
- Non, je n'ai pas eu besoin, c'est inné chez moi et tu vas voir que je peux être encore plus conne. Tu vas commencer par remettre les 2 couvertures que tu as piqué et qui sont au fond de ton sac, sur les sièges classe affaire ou tu les as trouvés, sinon à l'arrivée tu seras reçu par la douane pour importation de marchandises illicites. De plus, dès la fin du débarquement, je me ferai une joie d'aller à la police afin de faire une main courante pour signaler la tentative de vol sur produit à circulation douanière limité à la zone aéroportuaire. Ce qui est à nos yeux à tous le moyen le plus ridiculement simple mais qui reste le plus efficace pour que tu sois fiché à la douane ET à la police du plus grand aéroport de France, ce qui promet d'agrémenter tes prochaines arrivées à Roissy.
En attendant, tu vas retourner à ton siège, et fondre. Je ne veux plus ni te voir, ni t'entendre jusqu'à ce que J'AI quitté cet avion.
Quand ma copine est repassée en cabine, chaque couvertures avaient comme par magie retrouvé sa place.
Pendant tout le reste du vol, Les deux passagers se firent tellement petits qu'on aurait pu effectivement croire qu'ils avaient fondu. Le couple n'osait même pas lever les yeux de peur de croiser le regard meurtrier de la CCP, et espérant peut être par ce geste de soumission, la dissuader de faire un détour par la police de l'air et des frontières.
De toute façon, ils avaient rendu les couvertures, et surtout, elle avait mieux à faire que le planton à la PAF après un vol, l'appel de son lit était bien trop fort.
Franchement, vous imaginez la scène? Vous êtes là tranquille, vous ne demandez rien à personne, vous faites votre boulot, quand un quidam sortie on ne sait d'où vient violemment vous traiter de conne. Aurez vous envie de rester calme? Et je parle bien d'avoir envie de rester calme et non de pouvoir rester calme.
N'aurez vous pas plutôt envie d'écraser ce genre de mouches à merde, avec une tapette et de vous adresser à lui uniquement selon les mots de Pierre Bénichou, stromae de la formule, génie de la phrase, rossignol d'Oran (et accessoirement chroniqueur chez Ruquier).
"Qui qu'à mis ça là, pis qu'à pas balayé?"