DENOUEMENT (Meaning of safety)
2 heures déjà que le vol IW 9164 tourne au dessus d'Antalya. Le temps s'écoule doucement en cabine.
Deux fois déjà la voix du CDB à retentit dans le public adress.
- PNC assis attachés.
Les pilotes ont fait un premier passage à 1000 pieds (un peu plus de 300 m) et un second à 500 pieds afin de permettre aux observateurs de la tour de contrôle d'évaluer les dégâts sur le train.
Avec l'accord de Patrick le commandant, Luiggi autorise les hôtesses à s'isoler à tour de rôle au poste de pilotage, avec ordre de ne parler que si les pilotes s'adressent à elles. Cela leur permet de s'extraire quelques minutes de la vue des passagers et les pilotes apprécient certainement de ne pas rester seuls tout ce temps dans la tour d'ivoire qu'est leur cockpit.
C'est vrai qu'au poste le temps leur semble long à eux aussi. Mais aujourd'hui, la chance est avec eux. Un deuxième MD83 de la compagnie s'est posé entre temps à Antalya et Michel le CDB, sur demande de Patrick, s'est empressé de rejoindre la tour de contrôle afin d'assister, ne serait ce que moralement ses collègues.
Sa présence fait du bien aux deux pilotes.
2H15 de vol, l'avion à commencé sa lente descente vers la piste.
Luiggi vérifie la préparation de la cabine et de ses PNC.
- PNC, préparez vous pour l'atterrissage.
Tout le monde se tait dans la cabine. Les signes de croix se multiplient. On entend ça et là un sanglot.
Les PNC rejoignent leur poste de sécurité.
Assis et sanglé à son poste en porte 11 à l'avant gauche, Luiggi se dit que si il doit mourir aujourd'hui, il aimerait bien que cela soit brutal. Il ne veut surtout pas souffrir.
- PNC atterrissage
Le train principal droit étant défectueux, les pilotes doivent se poser sur les deux qui restent, et pendant le roulage, maintenir l'avion le plus longtemps possible sur le train gauche et la roulette de nez.
Ils réussissent avec brio. A 22h45 GMT, l'avion se pose sur la piste militaire de l'aéroport puis glisse pendant quelques secondes sur le train gauche. Le train défectueux touche à son tour la piste, roule sur la jante puis finit par s'affaisser.
Au bout de quelques minutes qui paraissent interminables en cabine, l'avion s'immobilise enfin.
Aussitôt les pompiers commencent à l'asperger de neige carbonique afin de le refroidir et d'éviter tout risque d'explosion. Pendant l'atterrissage, les observateurs extérieurs ont pu apercevoir des flammes sortant de l'aile droite et de l'arrière de l'appareil et le train droit a produit des étincelles.
PNC comme passagers sont soulagés. Tout le monde est sain et sauf, mais ce n'est pas terminé. Il faut quitter l'appareil le plus rapidement possible.
A l'avant, Luiggi ne peut pas ouvrir la porte droite(21) à cause des jets trop puissants de neige carbonique. Il ouvre la porte gauche(11). Impossible d'évacuer, le toboggan est à pic. Aidé de son pax requis, il redirige les pax vers l'arrière, et dans le même temps, demande au CDB de prévenir les pompiers de la situation.
Quelques secondes après, Luiggi arrive enfin à ouvrir sa porte droite, ce qui lui permet d'évacuer les quelques passagers restant encore à l'avant. Un pompier arrivé dans l'avion par le toboggan de la porte arrière l'informera que l'avion est vide et lui donnera l'ordre d'évacuer à son tour.
Au sol c'est l'euphorie. Les passagers s'appellent, se comptent, s'embrassent, embrassent les PNC. Ils sont surexcités.
- Merci, merci, vous nous avez sauvés.
- Vous êtes formidables.
- On ne vous oubliera jamais.
Emportés par cette ambiance festive, les PNC se retrouvent au milieu de la foule prêt à monter dans un bus en partance pour le club med ou un grand buffet a été préparé. Mais soudain Luiggi revient brutalement à la réalité; ce n'est pas du tout la procédure. Ils n'ont rien à faire dans ce bus. Ils doivent tout de suite retrouver les pilotes perdus dans la confusion.
Quelques heures plus tard, tout l'équipage repart en passager pour Paris, où ils sont reçus par un comité d'accueil composés de médec in, de psychologue et de tout ce que la compagnie compte de chefs,
Queques semaines plus tard lors de son maintien des compétences, Luiggi fut recalé à son test de sécurité sauvetage annuel et fut obligé de le repasser une seconde fois. A cause d'un blocage psychologique, il a été incapable de citer les différents points d'une préparation cabine en vue d'une évacuation alors qu'il l'avait réalisé parfaitement en situation.
Pour la petite histoire, le 15 octobre 1997, soit 8 mois plus tôt, aux environs de 7h15 du matin, un camion piégé explose dans le parking de l'hôtel Galadari à Colombo, Sri Lanka. La déflagration causera la mort de 20 personnes et fera 110 blessés ainsi que d'importants dégâts matériel.
Des membres d'équipage de la même compagnie, en repos à l'hôtel, faisaient partie des blessés.
Une partie de l'équipage est resté coincé plusieurs heures dans un hôtel dévasté, sans aucun contact avec l'extérieur, autre que les coups de fusil qu'ils entendaient résonner.
Ils se sont tout de suite organisés pour trouver une issue et ont même pris en charge d'autres passagers complètement prostrés face à la situation. Une journée horrible pour tous.
Les responsables de la compagnie et du service PNC, grand seigneur, ne les ont mêmes pas rapatriés sur Paris et les valides ont assuré comme prévu leur vol colombo-Sydney.
Luiggi faisait partie du groupe coincé dans l'hôtel et traumatisé par ces évènement, ils avaient obtenu sa mutation sur le réseau de vols domestiques.
Quand je vous dis que ce métier n'est pas de tout repos.